Un peu moins de trois ans après Le Voyage de Chihiro, Miyazaki Hayao revient dans la salles françaises avec Le Château Ambulant. Tiré d’un roman de Diana Wynne Jones, Le Château de Hurle, ce nouveau long métrage du studio Ghibli nous arrive seulement deux mois après la sortie japonaise. Signe que le cinéma d’animation asiatique s’est définitivement imposé et est enfin reconnu par le grand public français. Bonne nouvelle pour l’animation traditionnelle, à l’heure où les studios Disney ont annoncé avoir abandonné cette technique après leur dernier film : La Ferme se rebelle.

Mais revenons au coeur du sujet : Le Château Ambulant. Sophie, le personnage principal, est une jeune femme exerçant la profession de chapelière. Un soir comme les autres, elle fut maudite par la Sorcière des Landes qui lui jeta un sort. La jeune femme prit alors l’apparence d’une grand-mère de 80 ans. En désespoir de cause, elle quitta sa famille et parti à la recherche d’un moyen pour inverser la malédiction. C’est alors que sa route croisa celle du Château Ambulant où réside le prince Haoru, craint par la population en raison de ses pouvoirs magiques. A partir de ce moment-là, Sophie va vivre pour son plus grand bien un périple auquel elle ne s’était pas préparée.

Magnifique conte de fée, le scénario du film nous entraîne dans un monde mêlant magie et technologie du XIXème siècle, à la grande époque de l’industrialisation du monde moderne. Les décors rappellent aisément les zones portuaires du Nord de la France ou du Sud de l’Angleterre, avec leurs trains et bateaux à vapeur, et les premières automobiles et tramways. L’insertion d’éléments magiques rend ce monde si proche de nous désespérément attirant. On aimerait s’y plonger dedans tout entier, mais la barrière de l’écran nous en empêche. On regrette que le film ne dure que deux heures car la séparation au bout du compte est relativement difficile. Le studio Ghibli a produit avec Le Château Ambulant son oeuvre la plus aboutie techniquement à ce jour. L’animation dépasse de loin tout ce que l’on a pu voir sur grand écran. Les personnages ainsi que les décors sont perpétuellement en mouvement, créant une somme considérable d’animations augmentant le niveau de finition du film.

Kiki, la petite sorcièreCependant, la technique, même parfaite, ne fait pas tout. Le scénario compte énormément et c’est peut-être sur ce point-là que Le Château Ambulant recevra le plus de critiques. Laissant la part belle à l’imagination, le scénario nous plonge dans une guerre entre deux nations dont nous ne savons rien. Ce conflit n’est pas le centre de l’intrigue mais simplement un prétexte pour expliquer la révolte intérieure du personnage d’Haoru. « Facile », diront certains. Qu’ils parlent ! Certes, la profondeur du Château Ambulant n’égale pas celle de Princesse Mononoke et les bons sentiments sont légions, mais le film n’en reste pas moins très prenant, rempli d’humour et extrêmement divertissant. En cela, il est très proche de Kiki, la Petite Sorcière, autre film du studio Ghibli produit en 1989 et sorti l’année dernière seulement sur nos écrans. De nombreux parallèles pourraient être fait entre les deux productions : un univers graphique très européen, deux personnages principaux féminins contraints de quitter leur famille pour entreprendre un grand voyage initiatique, etc…

Toutefois, Le Château Ambulant reste une oeuvre originale d’exception. Bien que tiré d’un livre, le film est imprégné du savoir-faire et des touches personnelles de son réalisateur : Miyazaki Hayao. La musique, une fois encore composée par Hisaichi Joe, conforte ce fait. Il s’agit bel et bien d’une production Ghibli à la hauteur de ses aînées et qui encore une fois trouvera probablement son public dans les salles obscures.

Chronique publiée le 21 janvier 2005
par Christophe SAUVEUR